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En 1960 s'ouvre à Londres le "procès du siècle" opposant la Couronne britannique à Penguin Books. En vertu d'une nouvelle loi autorisant la parution d'une œuvre "obscène" si un tribunal lui reconnaît des qualités littéraires, l'éditeur a publié le roman de D. H. Lawrence, L'amant de lady Chatterley, interdit depuis sa sortie à compte d'auteur en 1928. Le procureur Mervyn Griffith Jones fustige des pages où le sexe est "ramené à la moindre occasion". Face à lui, des professeurs de littérature, des critiques, et même un évêque prennent ardemment la défense du roman. La procédure débouchera sur un "non coupable" unanime et le public se ruera sur ce livre, peu avant le déferlement de la révolution sexuelle.
La conquête du plaisir
Se replongeant dans les minutes de ce procès, dont les interventions "pour" et "contre" sont jouées par des comédiens, ce documentaire, nourri d'archives et d'interviews, celles de Sylvain Tesson et Catherine Millet notamment, souligne l'épaisseur et la modernité du roman, occultées par une réputation sulfureuse qui suscita fantasmes et malentendus. En racontant les amours d'une aristocrate et du garde-chasse de son époux, revenu, lui, impuissant de la Grande Guerre, D. H. Lawrence repousse les limites de ce qui peut s'écrire dans une Angleterre corsetée. S'inspirant de son épouse Frieda, avec qui il vit une relation libre, il décrit l'émancipation d'une femme à travers la conquête du plaisir. Mais s'il dépeint le sexe sans fausse pudeur, il en montre aussi la dimension rédemptrice, amoureuse, et les ébats des amants se doublent d'une douce communion avec les bois alentour. Ce "requiem pour une nature blessée" dénonce au passage les ravages de la guerre et de l'industrie. Fils de mineur, Lawrence ose enfin mêler les classes sociales, à travers cette idylle entre un prolétaire et une lady. Autant de transgressions qui lui vaudront les foudres de la censure. Ce documentaire offre un juste retour sur une œuvre dont le scandale a longtemps éclipsé la force littéraire.
Sur ce simple fruit s’est bâti un empire. Raconter l'épopée édifiante de la banane, entre l'Amérique centrale et les États-Unis, c'est revenir aux sources d'un modèle plus que jamais d’actualité – un capitalisme se jouant des frontières et des lois nationales pour assurer à ses actionnaires des profits maximaux, jusqu’à menacer la démocratie. Quand elle apparaît au tournant du XXe siècle sur le marché nord-américain, la banane, denrée rare et chère, est réservée à une élite aisée. Minor Cooper Keith, entrepreneur visionnaire et dur en affaires, va faire d'elle un produit de consommation populaire, sur lequel il édifiera la première multinationale au monde. Bâtisseur du chemin de fer costaricain, il promet au lendemain de la Première Guerre mondiale aux jeunes nations d'Amérique centrale un développement basé sur la monoculture et l'exportation de la banane, en échange de terres achetées à vil prix, souvent confisquées aux petits paysans indiens, de l'usage gratuit des lignes ferroviaires qu'il construit et d'une quasi-exemption d'impôts.
"Le Poulpe"
Née en 1899, l'United Fruit Company (UFC) constitue trente ans plus tard une puissance régionale incontestée, édictant ses propres lois sur d'immenses plantations qui s'étendent jusqu'en Colombie. "Le Poulpe", comme on la surnomme, fait venir de Jamaïque une main-d'œuvre corvéable à merci, pourchasse les syndicalistes et fait pression sur les gouvernements des républiques "bananières". Quand, en 1933, quatre ans après la mort de Keith, un self-made-man né en Moldavie, Samuel Zemurray, alias "le tsar de la banane", reprend les rênes du mastodonte, il amplifie ces méthodes, notamment grâce aux services du père des spin doctors Edward Bernays. En 1954, avec l'appui du gouvernement Eisenhower, tous deux chasseront du pouvoir au Guatemala le social-démocrate Jacobo Árbenz Guzmán, coupable d'avoir nationalisé pour sa réforme agraire des milliers d'hectares de l'UFC. La guerre civile déclenchée alors fera plus de cent mille morts jusqu'en 1996…
Les multinationales d'aujourd'hui ont repris les pratiques inaugurées par l'UFC en Amérique latine : intégration verticale, poursuite du monopole, privatisation des ressources, évitement fiscal. La monoculture intensive d'un produit d'exportation, qui épuise les sols et empoisonne les travailleurs, reste elle aussi en vigueur dans une grande partie du monde. Grâce à un montage d’archives rares, le film retrace près d'un siècle de règne sans partage. Des spécialistes (Geoffrey Jones, historien des multinationales à la Harvard Business School, Gaël Giraud, économiste à l’Agence française pour le développement, et la philosophe Cécile Renouard, enseignante à l’Essec) commentent cette histoire édifiante et en partie oubliée, illustration éclairante des dérives du capitalisme.
Grâce à son dynamisme et aux grandes réformes de 1991, l’Inde est devenue l’une des locomotives de l’économie mondiale, surfant avec succès sur la cyber-révolution.
Dans des centres d’appels où il est interdit de parler une autre langue que l’anglais, les coolies hightech travaillent à distance et à moindre coût pour des entreprises britanniques ou américaines. Maintenance informatique, gestion des ressources humaines… ils gèrent de plus en plus de tâches. Attirés par ce renouveau, les “cerveaux” commencent à revenir d’exil. Mais ce boom économique demeure fragile et ne profite pour l’instant qu’à une minorité d’Indiens. La classe moyenne supérieure ne représente que 40 millions de foyers dans un environnement majoritairement rural où un tiers des habitants vit avec un dollar par jour… Ce pays qui sera le plus peuplé du monde en 2025, avec environ 1,4 milliard d’habitants, arrivera-t-il à répartir également les fruits de la croissance ?
En cinq ans, au Pérou, plus de 300 000 femmes et près de 30 000 hommes ont été stérilisés de force par le gouvernement d'Alberto Fujimori, soutenu par les instances internationales. Au nom de la lutte contre la pauvreté, les Indiennes quechua en ont été les premières victimes. "Ils ne m'ont rien demandé... Ils m'ont emmenée comme un animal dans la salle d'opération", témoigne Yoni. Comme des milliers d'autres femmes, ses trompes ont été ligaturées de manière irréversible dans des conditions dangereuses. Nombreuses sont celles qui sont mortes des suites de leur stérilisation ou qui lui doivent, aujourd'hui encore, de lourdes séquelles.
Responsabilité internationale
Ce documentaire d'investigation donne en priorité la parole aux victimes. Face à la caméra, elles témoignent avec dignité de la brutalité de l'opération imposée qui a bouleversé leur vie. Autour de ce choeur de femmes, le film resitue le cas du Pérou dans une histoire globale du contrôle des naissances. Il met en lumière le rôle fondamental de la Banque mondiale, des Nations unies et de l'USAID (l'agence américaine d'aide au développement) qui l'ont érigé en instrument de lutte contre la surpopulation, fût-ce au prix de milliers d'existences brisées. Si le cas des 8 millions d'Indiens stérilisés de force sous Indira Gandhi, dans les années 1970, a été dénoncé depuis comme un immense abus de pouvoir, la tragédie des femmes péruviennes était jusqu'ici restée dans l'ombre
Des enfants de 8 à 13 ans, fils et filles de médecins, d’agriculteurs, de gendarmes ou d’épiciers jouent devant la caméra au métier de leurs parents. Rien n’est écrit, ni répété : ils improvisent au fil de leurs désirs et nous représentent ainsi le monde tel qu’ils le comprennent ou le devinent. Histoires vécues, entendues ou « vues à la télé » ? Plongée dans l’imaginaire ou reproduction de la réalité ? À travers leur perception de ces métiers, de leurs difficultés, de leurs plaisirs et de leurs peines, les enfants nous en disent long sur nous.
Au cours de sa longue vie, Picasso a rencontré de nombreux photographes avec qui il a tissé des liens solides et à qui il a offert de splendides images. Surtout, devant ou derrière l’objectif, le peintre a vite utilisé la photographie comme un prolongement de son art.
D'abord photographe pour immortaliser des moments, des lieux et des personnes importantes à ses yeux, ce visionnaire pressent rapidement les possibilités infinies de cet art nouveau : magnifier, témoigner, mais aussi déformer la réalité et en offrir une représentation abstraite. Il utilise alors la photo comme média complémentaire, qu'il détourne, découpe ou colle ou dans des compositions que seule la technique photographique permet. Avec, entre autres, le témoignage du photographe Lucien Clergue, ami et portraitiste de Picasso.