En fait, à défaut de danser vraiment, le narrateur écoute les confidences de son copain de lycée devenu star de cinéma, observe le malaise d'une très jeune adolescente déjantée, se laisse séduire par des jeunes femmes adorables dont certaines meurent ou disparaissent, regarde les glaçons fondre dans son whisky en se soulant de jazz et de chansons pop. Surtout, entre deux petits plats qu'il prépare dans sa cuisine, il cueille l'irréel qui s'introduit de plus en plus dans sa vie et pénètre lui-même avec une facilité déconcertante dans l'intangible que ce soit à Tokyo, à Honolulu ou Hokkaido. Inutile d'être doué (le héros est un publicitaire free-lance plutôt ordinaire, d'un humour juste un peu décalé), il suffit d'être ouvert et sensible à tout. Il suffit d'avoir pour créateur un écrivain aussi virtuose que Murakami, expert dans le passage de la ligne de démarcation entre un univers irréel et une réalité si souvent incohérente. Né à Kyoto en 1949, Haruki Murakami a étudié la tragédie grecque, dirigé un club de jazz à Tokyo, traduit Fitzgerald, Irving, Chandler, Carver avant de se consacrer entièrement à la littérature. Le Seuil a publié La Fin des temps (Prix Tanizaki), La Course au mouton sauvage, La Ballade de l'impossible, L'Éléphant s'évapore et Chroniques de l'oiseau à ressort.