Rarement souverain pontife a autant déconcerté. À peine intronisé, le cardinal Bergoglio renverse un ordre établi depuis des siècles : au lieu de bénir la foule, il lui demande de le bénir. Bientôt, l'Église va accueillir les divorcés, reconnaître les personnes homosexuelles, envisager – avant d'y surseoir – l'ordination d'hommes mariés, réprimer les traditionalistes en les privant de l'ancienne liturgie, ou encore fraterniser avec l'islam. Et pour couronner ce pontificat réformateur, ouvrir la gouvernance de la communauté catholique, apanage des clercs, à tous les fidèles : à eux, désormais, de conduire l'Église, au pape de les servir. C'est la révolution permanente au Vatican. À commencer par la façon d'incarner le métier de pape : élever les pauvres, les exclus, les migrants ; humilier l'argent et les puissants ; museler la curie romaine en attaquant ses vieilles habitudes de pouvoir ; et, pour y parvenir, user d'un autoritarisme peu commun et d'une grande habileté. Mais l'immense popularité de ce pasteur ne se résume ni à ses audaces ni aux blessures iffligées. Ce redoutable politique est aussi un homme attachant qui tend la main à tous, pleure avec les éprouvés, chérit la sincérité, vit sa foi sans concession en communion intime avec le Christ. Dix années agitées et confuses. Elles ont rafraîchi l'image immuable du catholicisme, bousculé les colonnes du Vatican et tourneboulé l'identité de centaines de millions de catholiques. Jusqu'à rendre insaisissables après François les contours de l'autorité pontificale et faire douter certains de l'avenir de l'Église catholique.