Nouveauté
Son art de la déambulation, depuis son adolescence, a permis à Patrick Modiano de nouer une relation fusionnelle avec Paris. Lui seul sait en explorer le passé, l'atmosphère et les détails d'époques révolues. Plus qu'une toile de fond à ses romans, sa passion quasi obsessionnelle pour les lieux, les rues, les annuaires, les quartiers, l'a poussé à faire de la capitale un personnage omniprésent, un élément central de son identité littéraire. Sans chercher à tout prix à livrer un Paris vrai, véritable, conforme à ce qu'il a été, il écrit un Paris rêvé, dont les traces évanescentes ne subsistent que dans sa mémoire. Des photographies placées en tête du volume, accompagnées des mots de l'écrivain, émergent une topographie personnelle, une géographie intime des lieux parisiens calquées sur les souvenirs qu'il s'en est faits entre 1953 et 1972. De son premier roman, La Place de l'Étoile (1968) jusqu'à La Danseuse (2023), aux confins de la réalité vécue, remémorée et distordue, et du rêve, du matériel et de l'immatériel, du palpable et de l'insaisissable, le chemin emprunté par l'auteur révèle à quel point autobiographie et géographie réinventées nourrissent aujourd'hui encore son écriture, même après l'effacement des lieux. Aux neuf romans retenus pour la présente édition, parus entre 1982 et 2019, s'ajoute un récit inédit, Brassaï de la nuit. Dans un dialogue établi entre texte et images, vision doublement sublimée de Paris, Patrick Modiano revient sur le travail du photographe d'origine hongroise, ce « poète qui transmettrait très loin dans le temps les visages [des mauvais garçons] et les lumières noires et blanches de Paris ». Derrière les tableaux brossés par le Prix Nobel de littérature 2014, demeurent à jamais le Paris de sa jeunesse et ses territoires fantomatiques.