Pleines de grâce est l'histoire flamboyante de Qüity, une jeune journaliste dure à cuire de Buenos Aires, et de Cleopatra, une travestie qui, après avoir renoncé à la prostitution suite à l'apparition de la Vierge Marie, entreprend, avec une armée de putes, de trafiquants et de voleurs, de transformer son bidonville d'El Poso en une communauté autonome. Contraintes de fuir après que le pouvoir local a rasé le bidonville, Qüity et Cleo, dont elle est enceinte, racontent alors leurs aventures depuis Miami. Dans ce roman intense Gabriela Cabezón Cámara réussit à exprimer l'épopée cachée de tant de vies anonymes qui, défiant la logique imposée par l'ordre établi, inventent de nouvelles façons de vivre, en couple, en famille et en communauté. À la manière d'un opéra cumbia, drôle, violent et cru, illuminé par le personnage solaire de Cléo, Pleines de grâce, est sans doute l'un des grands romans queer argentin. // « La Vierge parlait comme une Espagnole médiévale et la journée commençait avec la première cumbia. Chacun articulait ce qu'il voulait dire dans sa propre syntaxe et c'est ainsi que nous avons construit une langue de cumbia pour raconter les histoires de chacun, j'ai entendu des histoires d'amour et de balles, de règlements de comptes et de sexe, cumbia joyeuse, cumbia triste et cumbia enragée toute la journée. Maintenant, je ne veux plus en écouter. C'est la raison de ce salon blanc, de ces fenêtres blindées, de cette température contrôlée. J'écris ce qui s'est passé avant et rien ou presque rien ne varie autour de moi : ma fille grandit bruyamment ailleurs dans la maison et Cleo vieillit et finit par se confondre avec les dames prospères, peroxydées et vulgaires de Miami. »