Il fallait être plusieurs "zorèys" pour aborder au Pays des Merveilles d'Alain Peters. Une langue aussi dense et fleurie qu'une forêt tropicale, des voix aussi perdues dans la réverb qu'un chant des sirènes, une aura d'icône insulaire, des vapeurs de rhum, un coeur nu... on voudrait être l'ami(e) qui tend la main au poète en perdition, mais on n'est que le collectif de musiciens qui allons reprendre ses morceaux. Alain Peters est un monument de la musique réunionnaise, une idole locale, et qui plus est, les rythmes de l'océan indien sont réputés injouables, incompréhensibles pour les nonlocaux. Il y a un pont à franchir, une passerelle à suspendre au-dessus des océans. Il ne faut pas traduire la langue créole pour la comprendre ; c'est son esprit qu'il faut tenter de saisir. Idem pour la musique. Il nous faut retrouver en nous-même, cet endroit intime d'où parle une langue secrète, mouvante, la langue de l'âme, du coeur, de l'imaginaire, une langue de résistance, fière et insoumise. Alain Peters s'exprime d'un endroit si profond, si juste, si simple et si sincère, si unique aussi, à la croisée des musiques, des religions, des continents... Entre catholicisme et hindouisme, Afrique et Occident, entre rock'n'roll et bal-la-poussière, entre star système et homestudio, il fait naître une perle rare d'un grain de sable dans le système. Il fallait être plusieurs pour poursuivre les dialogues entamés par Alain Peters, nous sommes six : 2 chanteuses et 4 instrumentistes, pour retracer la descente d'un "ange aux Enfers".