Paul Klee, bien souvent, est perçu comme l'artiste qui a tenté une transposition plastique de la musique. S'il ne fait pas de doute que sa formation musicale était des plus solides, que toute sa vie il a été passionné de musique, est-ce cet aspect de son œuvre qui peut intéresser un musicien ? Le passage de l'une à l'autre technique est-il un leurre ? Voilà à quoi répond le livre de Pierre Boulez.
II découvre Klee en 1947, pendant le premier festival d'Avignon, alors qu'il a lui-même composé plusieurs œuvres. Les toiles accrochées dans l'exposition organisée par Christian Zervos l'ont tout de suite impressionné. Ce n'est pas tant les correspondances musicales qui le frappent que les problèmes posés par le peintre et les solutions qu'il y apporte. Quelques années plus tard, lisant les cours du Bauhaus, la particulière intelligence de Klee lui deviendra encore plus évidente.
Sans être inspiré le moins du monde par lui, il rencontrera chez Klee une réflexion sur le phénomène de la création qui rejoint ses propres préoccupations. Pierre Boulez ne pense pas qu'une quelconque traduction des formes musicales, surtout celles qui sont régies par les règles les plus strictes, puissent avoir une traduction picturale. Mais il est persuadé que tel type d'approche, telle manière de résoudre une difficulté dans les dimensions d'un tableau peuvent à profit se retrouver dans une autre discipline.
Plus que tout, il admire le pouvoir de déduction du peintre, il souligne combien la réflexion à laquelle par là il a été lui-même conduit a, plus d'une fois, été une très efficace leçon de composition. Paule Thévenin