Le 10 juin 1944, les nazis commirent à Oradour-sur-Glane le pire des massacres sur le sol français en décimant la population de tout un village. Des trois cent cinquante femmes et enfants enfermés dans l'église qui sera livrée aux flammes, il n'y aura qu'une survivante. Par cet épisode atroce, Oradour est devenu, pour tous, le symbole martyr de la barbarie nazie dont il porte aujourd'hui encore les stigmates. Pourtant, si l'horreur du crime ne fait aucun doute et ne saurait poser question, soixante-dix ans après le drame, historiens, politiques, passionnés et survivants des deux belligérants s'opposent et se déchirent toujours sur ses causes profondes qui restent nimbées de mystères. Encore trop de silences jalonnent cette quête de vérité. La douleur est trop grande pour une France qui peine à assumer ses années noires, trop grande pour les habitants d'Oradour, descendants des victimes, fidèles gardiens du souvenir, trop grande aussi pour ces Français dont on oublie qu'ils ont participé au massacre : ces Alsaciens, ces « malgré-nous » enrôlés de force dans l'armée allemande qui, par la suite, firent le choix de n'en plus jamais parler. Ces malgré-nous incarnent à eux seuls la complexité et le déchirement de la population française à l'heure de la guerre : traîtres et bourreaux à la solde des Allemands aux yeux de la France libre, c'est seuls, sans officiers, qu'ils comparurent au procès de Bordeaux pour répondre de leurs crimes. Acquittés mais condamnés ? contraints ou forcés au silence? En se livrant à une enquête de terrain auprès des rares survivants de cet épisode et des spécialistes de la question, en ayant accès à des archives inédites françaises et allemandes, Régis Le Sommier, fort de son expérience de la guerre, nous propose un ouvrage nécessaire qui nous fait revivre le climat insurrectionnel d'une époque et rappelle à tous que, sans questionnement, il ne saurait y avoir de vérité historique.