Peu après l'éviction du guitariste Dave Navarro et le retour au bercail du petit surdoué John Frusciante, les Red Hot Chili Peppers revenaient sérieusement aux affaires avec "Californication", leur premier album depuis les dérives psychoïdes de "One Hot Minute" quatre ans auparavant. Monstre de groove chauffé à blanc, creuset dantesque où le rock, le rap et le funk fusionnent dans une insoutenable ébullition, "Californication" n'est rien d'autre que l'album de la renaissance, un bolide fusant à deux cents à l'heure à travers les lacets d'une route de campagne. Dès le premier morceau ("Around The World") où explose au visage de l'auditeur ébaudi un riff de guitare hypnotique que relaie bientôt une ligne de basse dégoulinante de groove et d'intensité, les Red Hot Chili Peppers indiquent clairement leur volonté de ne pas faire dans la dentelle. Et à aucun moment l'album ne se départ de cette contention ravageuse : le registre incisif se poursuit avec des salves de funk lourd et puissant comme "Get On Top" et "I Like Dirt", entrecoupé çà et là de ponctuations lacrymales ( "Scar Tissue", "Californication") et autres intermèdes tout aussi édéniques que lyriques comme "Savior" et "Right on Time". Dix ans après le dantesque "Blood Sugar Sex Magic", les Red Hot Chili Peppers confortaient avec panache leur assise au sein du panthéon de la scène rock internationale.