Cantar de Amor, où Fahmi Alqhai et la Accademia del Piacere sont rejoints par un autre musicien andalou, Juan Sancho (ténor célébré pour son activité opératique), est un parcours remarquable dans le dédale amoureux chanté en Espagne au XVIIe siècle. De nombreux tonos inclus dans ce nouvel album Glossa, qui accueille un nombre croissant de témoignages du monde sonore stimulant de Fahmi Alqhai, ont été composés par Juan Hidalgo (dont on fêta, l'année dernière, le quatrième centenaire de sa naissance). Ce compositeur, le plus important de l'époque, collabora avec le grand Pedro Calderón de la Barca à de nombreuses pièces de théâtre en musique. Malgré la perte de tant d'oeuvres dans l'incendie qui ravagea Madrid en 1734, Juan Sancho et la Accademia del Piacere ont réuni une excellente sélection de chansons qui expriment avec une théâtralité toute espagnole (!) l'amour et ses tourments. Alqhai et ses instrumentistes signent d'une interprétation dynamique une série de marionas, de chaconnes et de passacailles qui nous permettent d'atteindre le coeur musical d'une Espagne refusant alors l'influence culturelle des autres pays de l'Europe. Auteur de l'essai accompagnant ce disque, Juan Ramón Lara situe dans une perspective actuelle l'importance qu'eurent au XVIIe siècle Juan Hidalgo et d'autres compositeurs comme Mateo Romero ou José Marín, ces protagonistes d'une incroyable éclosion artistique malgré la crise financière imminente.