Sang chaud et verve drue ne sauraient mentir, et cette Malfilâtre-là, Mathilde-Marie, un prénom d'archiduchesse, rend des points à son lyrique ancêtre, Jacques-Louis, douloureux poète des Lumières. Luna, l'héroïne du roman, la neuve, l'unique, le feu à la fente et la joie au coeur , pitbullise sa vie jusqu'au sang, racle l'os et avale tout sans trembler. En témoigne ce Babylone Express qui entre au catalogue du Dilettante avec des entrechats de voiture-bélier et des vocalises de lance-flammes. Quelque part entre Burroughs et Grisélidis Réal. Rita Renoir en plein vaudou. Les choses avaient pourtant dignement commencé : madrée lieutenante de la gendarmerie nationale vouée à l'observation des éco-terroristes, elle affiche 1,73 m d'efficacité galonnée et 59 kilos de pugnacité opérationnelle. Un modèle. Mais voilà qu'elle se découvre et un coeur de chevaucheuse de dragons et des appétits d'ogresse. Apocalypse XXL. Le dragon, en l'occurrence, se nomme Marco, dealer aristocratique et maquisard végan. Remisé l'uniforme, posées les épaulettes, s'enclenche alors une phénoménale partie de chaloupée cosmique. La bête à deux dos ricoche aux quatre coins de l'Europe. Des bars à beuh de Marrakech aux boîtes à partouzes de Berlin, des chevaliers du taste-shit aux keupons saumâtres, rien de ce qui fait étincelle ne leur est étranger. Nos tourtereaux dealent, draguent, dansent, se dopent, dévissent et se damnent avec une abyssale fringale de déglingue et un talent instinctif pour les soubresautantes extases lysergiques. Peu importe comment tout cela finit, passé certaines limites parler de ticket n'est plus tenable. Reste un livre ivre, crépitant et suicidaire, une tonique aubade aux vertiges toxiques. À s'injecter cul-sec. Merci jeune fille !