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Icône du goût français, libre et fantasque, Andrée Putman a imposé son style unique et entraîné dans son sillage une génération d’architectes stars. En archives et témoignages, un bel hommage à la papesse du design, disparue il y a tout juste dix ans.
Faut-il chercher dans l’abbaye de Fontenay, décor des étés de son enfance, et les touches de piano qu’elle a caressées avec assiduité la source de son goût pour le noir et blanc et pour les espaces épurés ? Née en 1925 dans une famille de la grande bourgeoisie, Andrée Aynard renonce à faire carrière dans la musique et devient journaliste. Ses articles lui valent d’être repérée par Denise Fayolle, qui la recrute chez Prisunic pour flairer les tendances du moment. Des vêtements aux objets de décoration en passant par les œuvres des peintres amis (Jean Messagier, Bram Van Velde…) collectionnées par son mari, Jacques Putman, Andrée Putman contribue à la démocratisation du beau impulsée par l’enseigne de magasins populaires. À la fin des années 1970, son divorce douloureux la pousse à se réinventer : désormais installée dans un loft – l’un des premiers en France – de Saint-Germain-des-Prés, elle se fait connaître en rééditant des pièces de grands designers oubliés des années 1930 (Robert Mallet-Stevens, Eileen Gray…), avant de se lancer dans la création. En rupture avec l’exubérance des années 1980, dont elle devient pourtant une égérie – baladant dans les soirées du Palace sa silhouette rectiligne, héritée d’une chute dans une bouche de métro –, Andrée Putman affirme son style intemporel croisant formes géométriques, jeux de lumière et élégante sobriété. En 1984, elle accède à la renommée internationale en aménageant l’hôtel Morgans, à New York, pavant les salles de bains d’un carrelage en damier noir et blanc qui deviendra sa signature.
Autodidacte de génie
Du musée d’Art contemporain de Bordeaux au Concorde, de l’escalator du Bon Marché à l’hôtel Im Wasserturm, sis dans le château d’eau de Cologne, l’architecte d’intérieur et designer autodidacte s’est imposée comme l’ambassadrice du goût français à travers le monde. Entrelaçant archives, focus sur ses réalisations emblématiques et témoignages d’intimes et d’admirateurs (sa fille Olivia, qui a pris sa suite à la tête du Studio Putman, les designers Philippe Starck et Vincent Darré, le couturier Jean-Charles de Castelbajac, l’historienne du design Anne Bony…), Saléha Gherdane explore la vie et la carrière d’une femme éprise de modernité, disparue il y a dix ans.