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Comédien à la grande élégance, Anthony Perkins a été trop souvent réduit à sa performance d’assassin névrosé dans le chef-d’œuvre de Hitchcock. Portrait d’un acteur de charme aux multiples talents.
Fils tardif d’un comédien et élevé par sa mère après la mort de son père, survenue quand il avait 5 ans, Anthony Perkins, né à New York en 1932, s’entraîne dès l’enfance à jouer les rôles incarnés par le défunt. Après des débuts remarqués sur les planches à Broadway, sous la direction d’Elia Kazan, son premier film, La loi du seigneur de William Wyler, qui remporte la Palme d’or à Cannes, le révèle, à 24 ans, en fils de quaker pendant la guerre de Sécession. Mais alors que Hollywood s’en empare, l’acteur au regard troublant, qui partage un appartement avec son amant, le jeune premier Tab Hunter, doit cacher son homosexualité dans l’Amérique puritaine des fifties. Image du gendre idéal, il accepte de poser avec des starlettes pour les magazines qui s’arrachent ce successeur désigné de James Dean. Tab Hunter, lui, ne lui pardonnera pas sa trahison, quand il lui soufflera le rôle d’un champion de baseball dépressif dans Prisonnier de la peur. Doué, cultivé et plein d’humour, Anthony Perkins peut tout jouer, du névrosé au prince charmant. Dans le western Du sang dans le désert, il se hisse sans effort à la hauteur de Henry Fonda, avant de charmer sa fille Jane dans la comédie romantique La tête à l’envers (1960), genre où il excelle pareillement. Avec sa voix de crooner, il chante aussi, en anglais comme en français – sa version délicate d’"Il n’y a plus d’après" restera la préférée de Guy Béart. Mais en lui offrant le cadeau empoisonné de Psychose en 1960, Alfred Hitchcock, avec lequel il a adoré travailler, va bouleverser sa carrière, le film-phénomène lui valant à jamais d’être associé à la scène de la douche, tournée… par sa doublure, coiffée de la fameuse perruque.
Classe tous risques
Étrangement méconnu, Anthony Perkins, qui a vécu à Paris et obtenu, en amoureux passionné d’Aimez-vous Brahms ?, d’Anatole Litvak, le prix d’interprétation à Cannes, a tourné avec les plus grands, d’Orson Welles (Le procès) à John Huston (Juge et hors-la-loi) en passant par Claude Chabrol (Le scandale). Marié à la photographe Berry Berenson – qui périra dans les attentats du 11-Septembre –, l’acteur a peiné à se débarrasser du rôle envahissant de Norman Bates. Sans regret toutefois. Vingt-deux ans après, il acceptera, amusé, de retrouver le tueur atteint de dédoublement de la personnalité dont il a si bien restitué les fragilités, dans Psychose 2, avant de passer derrière la caméra pour Psychose 3. En archives et témoignages qui, tous, évoquent sa sensibilité et sa drôlerie, un portrait attachant d’un comédien élégant aux multiples talents, mort du sida en 1992.