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Un récit passionnant des prémices de la mondialisation, dont le point de départ, aux Pays-Bas, a beaucoup à voir avec le détail d’un tableau de Vermeer. Avec la voix de François Morel.
À l'automne 1911, Henry Clay Frick, un riche industriel new-yorkais ayant fait fortune, enrichit sa collection particulière avec un chef-d’œuvre de l'histoire de l'art, L'officier et la jeune fille riant, peint par Johannes Vermeer en 1657. Il représente un homme de dos conversant avec une jeune femme séduisante. Un élément dans ce tableau, attire le regard, détail dont le sens véritable n'aurait pas échappé aux contemporains du peintre : l'immense chapeau que porte l'officier. Pour en arriver à ce que la main de l’artiste inclue ce feutre démesuré, il aura fallu des inventions, des découvertes, des rencontres, des drames et quelques crimes : l’histoire de la naissance d’échanges autour du globe par un peuple hollandais passionnément épris de commerce.
Nicolas Autheman revient aux sources de cette mondialisation à travers ce chapeau peint par Vermeer, un feutre de castor dont la quasi-disparition en Europe poussa les marchands néerlandais à se tourner vers les États-Unis, présida au développement de New York et participa à la création de la première place boursière. Narré par François Morel, un éclairage ludique et inédit sur les prémices de notre monde globalisé, librement adapté de l’essai Le chapeau de Vermeer – Le XVIIe siècle à l'aube de la mondialisation de Timothy Brook (Payot & Rivages, 2012).
Quand un petit piment, placé par Velázquez au premier plan d'une toile, ouvre une fenêtre sur son époque… Un voyage ludique et captivant à travers l'histoire de l'art, celle de Séville et celle du Nouveau Monde, narré par François Morel.
Dans la salle que la National Gallery de Londres consacre aux trésors de Diego Velázquez, un tableau s'avère particulièrement énigmatique pour l'œil contemporain : Le Christ dans la maison de Marthe et Marie. Peinte en 1618, alors que le maître n'a que 20 ans, la toile met habilement en abîme la parabole biblique en se présentant à première vue comme un bodegón, scène de taverne alors très en vogue dans la peinture espagnole. On y voit une jeune fille s'affairer en cuisine, suivant les conseils d'une femme âgée. Devant elles, des poissons, quelques gousses d'ail, des œufs… et un piment rouge séché. Comment ce légume, originaire du Nouveau Monde, est-il arrivé sur une table de cuisine sévillane ? Pourrait-il constituer la clef d'interprétation de cet émouvant tableau truffé d'allégories et d'énigmes ?
Enquête picturale
À partir de ce détail qu'on pourrait croire anodin, une fenêtre s'ouvre sur tout un monde, à commencer par la Séville du Siècle d'or, l'un des plus grands ports d'Europe à l'époque, où affluent depuis la découverte des Amériques des aliments nouveaux. Dans le prolongement du "Chapeau de Vermeer" premier volet de cette collection, ce documentaire, narré par la voix de François Morel, propose une enquête picturale brillante et ludique, riche en digressions et en ponts entre les époques, qui met en lumière les influences multiples ayant nourri le génie de Velázquez. Il convoque des spécialistes inattendus mais toujours éclairants, d'une cheffe sévillane aux botanistes des jardins royaux de Madrid, de cultivateurs de piments à un prêtre mexicain. En filigrane, le piment nous parle d'échanges et de guerres, de transgression et de sensualité, de la démesure de l'art baroque et des crimes des conquistadors contre l'Empire aztèque… Et aussi, tout simplement, de l'art de peindre.
Troisième volet de cette collection originale sur l'histoire de l'art, ce savant documentaire passe au peigne fin le tableau Marthe et Marie Madeleine, chef-d'œuvre du Caravage aux multiples clefs, réalisé à l'heure de la Contre-Réforme.
C'est un peigne en ivoire à la dent cassée, comme négligemment posé sur la table au premier plan. Dans Marthe et Marie Madeleine, Michelangelo Merisi, dit Le Caravage, a représenté un épisode des Évangiles comme un arrêt sur image : Marthe, l'une des premières disciples de Jésus, y raconte la vie du Christ à sa sœur Marie Madeleine, prostituée à la boucle de cheveux frivole, l'incitant à épouser la foi chrétienne. Arrachée aux plaisirs terrestres, celle-ci est saisie sur le vif, à l'instant même où elle est touchée par la grâce et où son monde intérieur se transforme. Symbole de sa vie passée de vanité, ce peigne constitue l'une des clefs du chef-d'œuvre. Comment cet objet intrigant est-il parvenu en 1598 dans la Ville éternelle, qui attire à l'époque tous les grands esprits et talents, mais aussi des bandits et vagabonds, et se métamorphose la nuit en capitale du désir, de la luxure, de la violence et de la démesure ? À l'heure où la Réforme menace ses dogmes et séduit les âmes perdues, l'Église utilise l'art comme une arme à la gloire de Dieu. Dans cette féroce croisade de la beauté, le maître du clair-obscur installé depuis peu à Rome, artiste bagarreur qui hante les bas-fonds et prend pour modèles courtisanes et gens de la rue, y est sollicité pour son génie.
Mystères de l'art
Décryptant les codes secrets de ce tableau nomade à l'attribution tardive, conservé à l'Institute of Arts de Detroit, Le peigne de Caravage plonge dans l'ambition artistique de la Contre-Réforme, les plaisirs transgressifs de la cité des papes et la soif d'absolu du Caravage. Il remonte aussi à la conquête par les Portugais, à partir des côtes africaines, du royaume Kongo au précieux ivoire, dont un mystérieux ambassadeur sera accueilli et inhumé avec les honneurs au Vatican... Pour éclairer cette histoire de l'art aussi savante que vivante, une série de personnages surprenants voire extravagants, la tenancière romaine d'un club libertin, un garde-forestier angolais, un duo de coiffeurs ou un ivoirier parisien, documentent l'enquête avec sagacité. À travers le détail de la toile du peintre naturaliste à l'ardente spiritualité s'ouvre ainsi, entre ombre et lumière, une vertigineuse fenêtre sur le monde.
D’hier à aujourd’hui, des stands illuminés aux réserves des musées, Marc Bellini, lui-même descendant d’une lignée de forains, explore la richesse de cet univers singulier et son influence méconnue sur l’histoire de l’art.
C’est en poussant les portes des ateliers de peintres et décorateurs forains que Marc Bellini a pris conscience de la force de leurs traditions créatrices et de l’attraction que ce monde exubérant a exercée sur les plus grands artistes de leur temps. De la Foire paysanne (1570) du Flamand Pieter Balten, où se croisent marchands, badauds et saltimbanques, au tourbillon coloré du Manège de cochons (1922) de Robert Delaunay, en passant par les deux panneaux réalisés en 1895 par Toulouse-Lautrec pour la baraque de la Goulue à la Foire du Trône, à Paris, de nombreux tableaux témoignent de l’inclination des peintres pour la fête foraine. La photographie, notamment surréaliste, a également trouvé un terrain d’expression dans ces allées où s’épanouit la bizarrerie, à l’image des Vénus de Man Ray et Erwin Blumenfeld, têtes réelles sur corps sculptés, qui s’inspirent des "passe-têtes" des forains. Ces derniers ont en outre contribué à la naissance de l’industrie cinématographique, en diffusant des œuvres et en produisant leurs propres films, entre sensations fortes et exploration des marges avec l’exhibition des "phénomènes".
Patrimoine éparpillé
Narré par l’acteur Éric Caravaca, ce documentaire nous entraîne à la Foire du Trône et à l’Auer Dult de Munich, à la rencontre de personnalités hautes en couleur, dont la quête d’innovations visuelles se nourrit de traditions et savoir-faire séculaires. Il donne également la parole à des spécialistes des arts forains (comme Zeev Gourarier, qui a constitué une collection d’objets dédiés au Mucem, à Marseille, ou Laurent Mannoni, le directeur scientifique du patrimoine de la Cinémathèque française …). Tous s’efforcent de sauvegarder ce patrimoine populaire éparpillé et de mettre en lumière ses liens insoupçonnés avec l’histoire de l’art. Entre gros plans sur des œuvres et immersion dans le déluge coloré des attractions contemporaines, le récit d’une aventure artistique aussi fascinante que mésestimée.